Par Simon Bégin et Yannick Patelli
««Le Québec, le monde agricole et même l’UPA gagneraient au jeu du pluralisme. Au risque de faire hurler certains de mes amis au sein de l’UPA, celle-ci ne se porterait-elle pas mieux après un ou deux ans si elle avait un concurrent?» < Celui qui pendant près deux décennies a été un grand interlocuteur du monde agro-alimentaire à titre de premier ministre du Québec, de ministre des Finances ou de ministre responsable de l’Économie, Bernard Landy, a invité en ces termes ses «amis de l’UPA» à envisager une évolution normale vers le pluralisme syndical au nom de l’intérêt du Québec, de l’intérêt du monde agricole et même de l’intérêt de leur propre organisation.
«Je dis souvent à mes étudiants que l’UPA est le plus puissant lobby qui soit et je ne m’en plains pas», dixit M. Landry pour qui, si les syndicats sont souvent casse-pieds, ils ont été et demeurent des grands artisans du progrès social et économique du Québec. Selon lui, cela est encore plus vrai pour le monde agricole qui est le secteur économique le plus complexe de tous non seulement en raison de sa très grande vulnérabilité aux aléas du climat et des marchés mais aussi parce que l’activité agricole est une composante essentielle de la sécurité d’un peuple, de sa culture et de son occupation du territoire.
Selon M.Landry, la force d’un grand syndicat agricole était sans doute nécessaire lors de la grande période de rattrapage sous René Lévesque alors que son ami Jean Garon portait le flambeau de l’agriculture, avec la mise en place de pièces maîtresses telles que la protection du territoire agricole, la stabilisation des revenus pour la ferme familiale et l’atteinte d’un haut niveau d’autosuffisance alimentaire. Mais le contexte n’est plus le même et qui dit pluralisme syndical ne dit pas nécessairement affaiblissement du syndicalisme agricole, estime M. Landy. Selon lui, tout comme l’existence de plusieurs grandes centrales, la CSN, la FTQ et les autres, n’a pas nui au développement du Québec, la fin du monopole syndical en agriculture serait sans doute une bonne chose pour le monde agricole et la société québécoise. «L’essentiel est que cela se fasse dans l’intérêt des agriculteurs et non pas des structures», affirme l’ancien premier ministre qui se dit très à l’aise avec la vision de Jean Pronovost présentée ailleurs dans nos pages d’une UPA qui demeurerait largement dominante et d’un autre syndicat, minoritaire mais crédible, qui offrirait une alternative aux producteurs tout en stimulant son «grand frère».
«Je sens que les choses évoluent au sein même de l’UPA où l’idée du monopole syndical n’est plus défendue avec la même véhémence qu’avant», a conclu M. Landry qui voit là une raison de croire en une saine évolution de ce grand mouvement.
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